vendredi 27 mars 2015

The Princess of Shoreditch, Londres


Même à Londres, un dimanche soir, qui plus le 1er janvier, le choix en tables intéressantes est réduit. Il faudra souvent compter avec un peu de patience et de recherche, ne pas hésiter à s'y prendre en avance, pour trouver son bonheur.

Mais quelle joie lorsque dans sa liste de lieux à ne pas manquer se trouve précisément ce type de perles... cette joie, je l'ai trouvée avec le Princess of Shoreditch, qui inaugurera mon année gastronomique 2015.

Très bien situé, près de Old Street, au cœur du quartier de Shoreditch, on trouvera le lieu. Shoreditch est un ancien quartier industriel au public relativement douteux reconverti en ce qui se fait de plus populaire et alternatif, offrant un cadre tout à fait particulier à la vie trépidante qui s'y déroule.
Que l'on cherche une galerie d'art alternative, un pub ultra authentique, une vieille librairie poussiéreuse, de la musique live en tout genre, des clubs branchés ou encore des tables en touts genre, Shoreditch est « the place to be »: aujourd'hui, c'est l'une des scènes numéro une de la restauration londonienne, où bon nombre de restos du genre « gastropubs » de qualité fleurissent. Le gastropub est un concept tout à fait excellent proposant dans un cadre simple et convivial des boissons et de la nourriture de haute qualité à prix relativement doux. On trouvera une tendance semblable dans la bistronomie... mais cela reste deux concepts différents. Bref... vous l'aurez compris, le Princess of Shoreditch est de ce genre.

Les propriétaires du Princess se sont installés en 2010, après avoir rénové un pub vieux de 270 ans. L'ambition non-dissimulée, être le meilleur pub de Shoreditch, tant pour la nourriture que pour l'ambiance en respectant le meilleur rapport qualité-prix possible. Grâce à un travail acharné et passionné, une grande attention au contenu de l'assiette et à l'écrin qui les accueille, très vite, le lieu fera parler de lui pour sa qualité, sera récompensé par les journaux, les guides. La marque de fabrique ? Une carte petite, changeant régulièrement au gré des inspirations du chef et de ce qu'il trouvera de plus frais et attirant sur les étals. Gourmandise, générosité, personnalité, originalité et excentricité sont des mots-clés très convenables pour ce lieu étonnant que je vais tâcher de vous faire découvrir.

St Paul Street, vous n'aurez aucun mal à reconnaître cette devanture arquée blanche, toute vitrée, d'un autre temps, insérée dans un bâtiment de briques apparentes tout à fait typique.


Passant la porte, on tombera dans un coin pub plutôt vivant pour un premier janvier fatigué mais qui sera sans aucun doute beaucoup plus animé d'habitude. Un beau pub habitée de tables de bois toutes simples, un bar très bien aménagé, et proposant des bières, cidres et vins de très bonne qualité à prix plutôt doux (carte semblable à l'étage). On peut y manger également, plutôt de la cuisine simple mais néanmoins travaillée avec des produits choisis. Ici, premier arrivé, premier servi, pas de réservation côté pub. Mais on n'oubliera pas de réserver si c'est plutôt du côté restaurant que l'on veut manger.

Il faudra alors monter au premier étage. Un escalier métallique en colimaçon y mène, nous laissant découvrir un décors et une ambiance autres.


Me voilà arrivé dans une petite salle aux fenêtres arquées, une douzaine de tables de bois un peu éparses, bougies sur chacune, pas de nappes ou autres agencement, juste ces belles tables un peu brut. Aux murs, des tableaux en noir et blanc dont juste un élément est coloré dans des tons assez acides. En fond de salle, une belle cheminée surmontée d'un lourd miroir.


La salle n'est pas bondée, mais correctement remplie à bien 70-80%: couples ou amis, le lieu semble à propos à toute occasion. En toile de fond, une musique un peu swing, ou alors passant sur de la chanson française, Brel et Nougarro notamment, c'est étonnant et plaisant.

Au Princess or Shoreditch, c'est une carte réduite que l'on trouvera: 5-6 entrées et plats, et aucun ne failli de mettre en appétit. On notera que la carte est différente le dimanche du reste de la semaine. Pas moins fournie, elle semble simplement composé de plats plus ménagers, moins de préparations minutes, plus de tradition (en gardant une pointe de raffinement) tandis que la semaine sera plus osée dans les assiettes, mêlant plus d'innovation à la tradition, citant quasi systématiquement les provenances des matières premières qui sont des références locales. Ce soir c'est dimanche, et un 1er janvier à Londres, je mangerai traditionnel et cela ne me dérange aucunement ! Le dimanche comme la semaine, c'est la viande qui aura part belle à la carte, mais il y a toujours une proposition de poisson et végétarienne qui n'ont aucunement à rougir du reste. Autant dire que le choix sera difficile.

En attendant, on me porte un panier de pain de farine assez complète, ensemencé au levain, vraiment de très belle tenue et d'un très bon goût, servi avec un bon beurre légèrement salé dans une coupelle. Très bon signe.


En entrée, je choisis la « Cullen Skink ». Mais encore ? Il s'agit d'une soupe assez épaisse, très traditionnelle en Écosse avec pour ingrédients essentiels, selon la recette d'origine, du haddock fumé, des patates et de l'oignon, parfois épaissie à la fécule. Cette soupe a entièrement respecté la tradition, avec une présence assez importante de céleri en plus. Une belle couleur blanche, épaisse et gourmande, un équilibre très bien géré de salé-fumé qui fait de cette soupe une entrée réconfortante, très plaisante et très originale pour qui ne connaît pas.


Pour le plat, il faudra s'accrocher avec le « Roasted Charles Ashbridge rare breed sirloin & slow cooked featherblade ». S'accrocher car je n'ai que très rarement eu devant moi une assiette aussi énorme et qui, plus est remplie. Même si la photo ne fait pas honneur à l'aspect visuel, l'assiette reste appétissante et agréable à la vue. Avec le plat, on me porte sur un plateau six sauces plutôt traditionnelles: menthe, raifort, moutarde anglaise, moutarde de Dijon, moutarde à gros grains et une compote. Plus par curiosité, je prendrai les deux recommandées avec ce type de plats: moutarde de Dijon et raifort, toutes deux bonnes et très franches.

On verra arriver l'assiette de loin, couronnée d'un gros Yorkshire pudding, un accompagnement typique à base de farine, lait, œuf et eau, très apprécié avec les plats de viande grillée et plats en sauce. Ce dernier est excellent.
On aperçoit autour des pommes de terre entières doucement rôties dans la graisse de canard, tout à fait savoureuses, des petites carottes non-pelées ayant subit le même traitement et du brocoli cuit, quant à lui, à l'eau.

On ôte ce couvre chef pour découvrir une viande magnifique: une surlonge fort bien rassie sur os, le goût ne trompe pas, rôtie à la perfection, servie rosée, d'une tendreté parfaite. On est déjà impressionné par la quantité quant au découvre qu'au dessous se trouve une tranche toujours aussi généreuse de viande bouillie, sans doute de la palette, de saveur toujours aussi formidable et tout simplement fondante. Cela sans omettre un lit de chou frisé excellent. Un jus de viande exceptionnel vient conclure le plat.

Notons la provenance de cette viande, une référence régionale qu'est la Ferme de Charles Ashbrige, spécialisé dans l'élevage de porc, d'agneau et de bœuf, toujours de races choisies, dans des méthodes d'élevage respectueuses et un travail de la viande exemplaire.
J'admettrai ne pas forcément adhérer au raifort ou à la moutarde de Dijon, estimant qu'aussi bonnes soient ces sauces, elles dénaturent le goût. Un plat tout bonnement formidable, réconfortant, travaillé, riche et juste parfait.

Avec ce repas, je boirai de l'eau gazeuse (filtrée, purifiée, reminéralisée et gazéifiée sur place) servie dans des bouteilles estampillées par les lieux. Notons et saluons que l'eau se paie 1£ la bouteille, argent, en cette période de fête, totalement reversée à une œuvre caritative ayant pour intérêt les pauvres de Londres.


On se relâchera pourtant pas avec le vin du mois, un vin vénitien de Cecilia Beretta Valpolicella Superiore Ripasso 2012, un vin concentré, corpulent mais très bien structuré très plaisant.

Complètement repu (nooooon???), je ne peux m'empêcher de me laisser tenter par un dessert, la carte faisant trop envie : globalement, ce sont des desserts gourmands, pudding, tourte, cheesecake, fromages... mais toujours avec un petit quelque chose qui vient faire twister le tout. Le choix est difficile et je pencherai pour le « Sticky toffee pudding, bourbon toffee sauce, milk ice cream ». Un dessert chaud, un vrai péché ! Le pudding est spongieux et collant à souhait, au fort goût de toffee, avec des saveurs rappelant la figue séchée. Une sauce assez corsée au bourbon et au toffee vient corser la préparation et une crème glacée au lait savoureuse vient la rafraîchir. En gros, vous l'aurez compris, c'est sucré, gras, moelleux, chaud, froid, ça colle au dents.... Un monstre de décadence que l'on savourera avec une joyeuse honte !

Vous l'aurez compris, ce repas m'a permis de démarrer cette année sur des notes de tradition, de gourmandise, d’opulence et de plaisir. Un signe pour l'année future ?
Le temps d'être en capacité de me mouvoir, je prendrai un thé vert, servi en vrac, en théière, il est d'excellente qualité puis on demandera l'addition (que je redoutais un peu après avoir fait pareille bombance). Rien n'en fut: celle-ci s’élèvera à 50.85£, faisant du Princess of Shoreditch un vrai bon rapport qualité-prix-plaisir.

Il faut souligner la qualité du service dans un style plutôt décontracté mais d'une qualité et d'un professionnalisme redoutables. Un flegme so british enrobé d'un humour tout aussi typé, collant à merveille avec le côté décalé des lieux.

J'essaierai de venir en semaine une prochaine fois, pour apprécier le plein potentiel et la pleine ambiance des lieux. Quoi qu'il en soit, j'ai énormément apprécié ma rencontre avec la cette princesse des rues et ne peux que recommander mille fois d'y faire un tour !

76 Paul Street
London EC2A 4NE
Royaume-Uni

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